Le développement des EMR soulève un certain nombre d’interrogations souvent liées aux impacts environnementaux de ces nouvelles manières de produire de l’énergie. Les questions répertoriées sur cette page ont été traitées par des groupes d’experts scientifiques. Les réponses apportées ont été synthétisées et illustrées par France Energies Marines.

Les vagues d’impact générées par la chute d’objet au sein d’un parc éolien en mer peuvent-elles être dangereuses ?

Dans de très rares cas, lorsqu’une éolienne est défaillante, la chute d’un objet dans l’eau peut créer une vague d’impact qui peut se propager. Si ce phénomène se produit, cette vague est-elle dangereuse ?

Les vagues d’impact sont générées par la chute d’objets non naturels. L’impact d’une structure sur l’eau génère un splash et des ondes de radiation concentriques qui induisent la vague d’impact (fig. 5). Les ondes concentriques sont cantonnées à la surface et se dissipent rapidement. Le splash est un mélange d’air et d’eau qui dissipe une partie de l’énergie du choc. Il ne participe pas à la génération de la vague d’impact, et n’est pas dangereux. Plus la surface de l’eau est lisse, plus la surface de contact entre l’objet et l’eau sera grande, ce qui va favoriser les transferts d’énergie. Ainsi l’impact sera maximal par mer calme et minimal par mer agitée.

Schema Vague Impact Generee Par Chute Pale Eolienne

La physique mise en jeu lors de l’impact d’objets dans l’eau est très complexe car elle implique la compressibilité de l’air et la viscosité de l’eau. Elle met en jeu aussi l’interaction fluide/structure régissant la dissipation d’énergie par déformation des milieux impactants et impactés liée à leur différence de densité et de résistance au choc. Ainsi, seule une chaîne de calculs très complexes impliquant une physique fortement non linéaire est capable de répondre de façon précise à ce problème, ce qui n’est pas l’objectif ici. La philosophie de la méthode est donc de proposer une approche simplifiée en s’assurant du conservatisme des hypothèses à chaque étape, afin de conclure sur une valeur théorique maximale qui ne pourra en aucun cas être dépassée.
La probabilité qu’une éolienne ait une défaillance majeure au point de provoquer la chute d’un objet est très faible. Pour déterminer si la vague générée dans ce cas est dangereuse, les experts ont calculé dans un premier temps la hauteur de la vague générée par la chute d’objets provenant d’une éolienne. Afin d’être conservatifs dans la suite des calculs, le pire des cas a été étudié, c’est à dire une surface plane impactée par un objet. Il convient de noter que cet état de mer n’existe pas dans le milieu naturel.

En cas de rupture, le mât de l’éolienne toucherait l’eau de façon progressive de la base vers la nacelle. L’impact serait donc minime. De plus, la géométrie arrondie du mât implique une surface de contact instantané réduite. L’effort d’impact d’un objet sur l’eau étant proportionnel à la surface de contact instantané et au carré de sa vitesse, la chute du mât dans l’eau ne générera pas de vague dangereuse.
Il est presque impossible que les trois pales rompent en même temps, le cas de la chute du rotor n’est donc pas étudié. Le cas considéré ici correspond à la chute d’une pale d’éolienne d’une puissance 10 MW, d’une envergure de 86 m, se décrochant à vitesse de rotation maximale (10 tours/min) en position horizontale et en supposant que celle-ci stoppe sa rotation et atterrisse à plat sur la surface de la mer. Cette étude montre que la vague générée par un tel impact ne pourra théoriquement pas dépasser 3,4 m et à 600 m d’un point d’impact sera inférieure à 1 m. Cette vague n’est pas considérée comme dangereuse car les parcs offshores sont situés à plus de 10 km de la côte et les éoliennes sont espacées de 1 km.

En bref, la probabilité qu’une éolienne ait une défaillance majeure au point de provoquer la chute d’un objet est très faible. Si ce phénomène se produisait sur une mer calme, la vague générée par cette chute serait inférieure à 3,4 m et très vite atténuée. Cette hauteur serait bien moindre dans le cas où la pale chuterait dans une mer formée. Ainsi, les parcs éoliens posés ne peuvent pas générer de vagues d’impact dangereuses pour l’Homme.

La modification de l’état de mer au sein d’un parc éolien posé pourrait provenir du phénomène de diffraction et par l’instabilité modulationelle causée par le réseau d’éoliennes.


Une vague scélérate est une onde courte associant hauteur et cambrure importantes. Les vagues scélérates sont exceptionnellement grandes par rapport à leurs voisines. Les vagues sont générées par le vent, parmi celles-ci une vague scélérate peut être le résultat de : l’effet d’un courant fort contre de la houle, de la rencontre de deux systèmes de vagues, ou bien de la concentration de l’énergie des vagues à un endroit et un moment donné. Une vague scélérate peut apparaître dans un état de mer donné que l’on a sous-estimé : tous les phénomènes qui l’induisent n’auront pas été pris en compte dans les modèles de prédiction à court ou long termes.


Plus le diamètre des fondations est grand, plus les vagues sont diffractées. Ainsi, pour des fondations jackets (treillis métallique en acier), les vagues ne subissent pas de modification car la dimension de l’obstacle est très inférieure à leur longueur d’onde. Pour les fondations monopieux et gravitaires, les vagues pouvant être diffractées sont de faibles amplitudes et de courte période. Ces vagues vont se propager radialement. A 500 m de l’éolienne, il ne reste que 5% de la hauteur de la vague induite. Pour le pire des cas, à savoir des fondations gravitaires d’un diamètre d’environ 30 m, à 2 km du parc, l’état de mer s’est reconstitué, identique à ce qu’il serait sans la présence de la ferme. Il n’y a donc pas d’augmentation du risque de génération de vagues scélérates dangereuses causées par la diffraction inhérente à la géométrie du parc éolien.


Le mécanisme d’instabilité modulationelle peut également être à l’origine de la formation de vagues scélérates. Ce mécanisme correspond à une résonance non linéaire des différentes vagues présentes dans un train de houle. S’il y a une faible perturbation, l’équilibre qui existe entre une vague et ses voisines pourra être rompu. L’une des vagues du groupe captera alors, par résonance, l’énergie de ses voisines, devenant beaucoup plus grosse. Cette croissance pourra amener la vague à tripler sa hauteur initiale. Cependant, cette très grande vague aura une durée de vie limitée, puisqu’à terme, elle rendra son énergie à ses voisines. En pratique, ce mécanisme s’applique à des houles de très faible étalement spectral, évoluant en grande profondeur par rapport à leur longueur d’onde.


Les experts se sont interrogés sur les perturbations qui pouvaient être induites par l’espacement entre les éoliennes. Peuvent-elles déclencher ce mécanisme d’instabilité ? La climatologie des états de mers dans les parcs éoliens présents sur les côtes françaises permet d’affirmer que de telles conditions ne peuvent y être rencontrées, compte tenu des dimensions caractéristiques respectives des parcs et des états de mer.

En bref, le phénomène de diffraction au sein d’un parc éolien posé n’engendre pas de vague dangereuse pour l’Homme. De même, la climatologie des états de mers dans les parcs éoliens français permet d’affirmer qu’il ne peut pas y avoir de vague dangereuse créés par le mécanisme d’instabilité modulationelle.

Un tsunami est une onde longue qui se propage alors que la profondeur est très inférieure à sa longueur d’onde (conditions non dispersives). Le mouvement associé à cette onde concerne toute la colonne d ‘eau. L’origine d’un tsunami est le plus souvent géologique (séisme sous-marin, éruption volcanique, glissement de terrain côtier ou sous-marin), météorologique ou causée par l’impact d’un astéroïde. Un tsunami va créer un envahissement exceptionnel et rapide du rivage par la mer, dû à une surcote temporaire c’est à dire une élévation anormale du niveau de la mer.


Dans le cadre d’un parc éolien posé en mer, seuls les glissements sous-marins et côtiers peuvent être générateurs de tsunamis. Les parcs éoliens ne peuvent pas causer d’éruption volcanique, de séisme ou d’impact d’astéroïde. Les glissements ou effondrements côtiers résultent des effets combinés de phénomènes géologiques (déficit en sédiments côtiers, altération de la roche mère), océanographiques (houle, marée, courant) et météorologiques (précipitation, gel). Les parcs éoliens posés peuvent avoir une influence minime sur la houle, les courants, et sur le transport sédimentaire qui pourrait déstabiliser les falaises côtières.

Schema Mecanisme Generation Tsunami


Afin d’estimer la probable influence des parcs éoliens sur le transport sédimentaire, les experts ont calculé l’affouillement, c’est-à-dire l’érosion à la base de l’éolienne. La profondeur d’affouillement peut atteindre 1,7 fois le diamètre du monopieu et la distance d’affouillement de 10 fois le diamètre. Dans le cas de fondation gravitaire l’embase mesurant 36 m de diamètre, il n’y a plus d’influence majeure sur la dynamique sédimentaire au-delà de 360 m. Pour les autres types de fondation (jacket, monopieu) qui ont un diamètre moindre, la distance est inférieure. Les parcs éoliens étant situés à une dizaine de kilomètres des côtes, ils ne peuvent pas augmenter le risque de tsunamis liés à des glissements littoraux.


Les glissements de terrain sous-marins se produisent lorsque la pente du talus continental est importante. Les parcs éoliens posés sont situés en domaine de plateau continental avec une très faible pente. Un parc éolien en mer posé, ne peut donc pas générer de glissements sous-marins.

En bref, les parcs éoliens posés ne peuvent pas engendrer de tsunamis.

Plusieurs types de composants des parcs d’énergies marines renouvelables sont construits, stockés et entretenus dans les ports (ex : fondation gravitaire, flotteur…) avant d’être acheminés sur leur zone d’exploitation. Par la suite, certains composants sont ramenés au port pour leur maintenance.

Les ports étant des carrefours internationaux pour le trafic maritime, ils sont colonisés par des espèces non indigènes. Celles-ci pourraient coloniser les composants d’éoliennes, qui constituent des substrats vierges. Lors du transport et de l’installation de ces composants dans le milieu, des espèces fixées à leur surface pourraient se disperser alors dans l’environnement.

Schema Developpement Especes Non Indigenes Sur Composants Emr

Les experts recommandent d’acheminer rapidement les composants EMR sur zone afin de limiter le temps d’exposition à de possibles espèces non indigènes plus fréquemment présentes à proximité des zones portuaires et sur le littoral. Les experts conseillent également de mettre en place un protocole de suivi des fondations ou des flotteurs d’éoliennes afin d’observer et de signaler le développement d’espèces non indigènes.

Les eaux de ballast sont utilisées à bord des navires pour stabiliser ces derniers. Elles peuvent contenir des milliers de micro-organismes marins ou aquatiques, de plantes et d’animaux, lesquels sont ensuite transportés dans le monde entier. Elles peuvent être relarguées lors de la vidange des cuves.

La convention internationale pour le contrôle et la gestion des eaux de ballast et sédiments des navires (Convention BWM) a été adoptée en 2004. Elle est mise en œuvre depuis 2017 afin d’établir des règles mondiales pour contrôler le transfert d’espèces potentiellement invasives.

À titre de solution temporaire, avant la mise en place de système de traitement des eaux à bord de chaque bateau, les navires doivent renouveler leurs eaux de ballast en haute mer.

Schema Relargage Eaux Ballast Et Parc Eolien Mer

Si la réglementation est respectée, le rejet d’eaux de ballast non traitées ne devrait pas avoir lieu à proximité des parcs éoliens. En effet, la convention oblige les bateaux à relâcher les eaux de ballast à une distance très éloignée de la côte pour éviter la propagation d’espèces non indigènes.

Certains organismes marins, fixés à l’âge adulte, émettent des larves pélagiques (vivant dans la colonne d’eau). Elles se déplacent passivement selon l’influence des courants avant de trouver un substrat dur pour se fixer et se développer.

Pour ces espèces, les parcs éoliens installés dans l’environnement marin peuvent fournir de nouveaux habitats de substrat dur où les individus fixés se développent, et se reproduisent à leur tour. Les larves émises se dispersent à partir de ce nouveau point et peuvent ainsi atteindre de nouvelles zones rocheuses : c’est l’effet relais.

Afin d’illustrer l’effet relais que pourrait avoir les éoliennes en mer, nous avons choisi de traiter un exemple simple : un récif rocheux éloigné d’une certaine distance d’autres récifs. Entre ce récif et ces zones rocheuses, un parc éolien est construit.

Schema Mecanisme Effet Relais En Presence Parc Eolien Pose

Avant l’installation du parc, les organismes situés sur les récifs de l’écosystème A émettent des larves. Les distances maximales de dispersion des larves ne leur permettent pas d’atteindre les récifs rocheux de l’écosystème B. Lorsque le parc est en fonctionnement, les organismes situés sur le récif naturel de l’écosystème A émettent des larves. Les fondations des éoliennes en mer, leurs ancrages et les flotteurs d’éoliennes flottantes vont jouer un rôle de récif artificiel. Les larves vont se fixer et coloniser les fondations d’éoliennes. Une fois fixés, si les conditions sont propices, les organismes s’y développent et s’y reproduisent, en émettant à leur tour des larves pélagiques dans la colonne d’eau.

Des courants favorables permettraient aux larves d’atteindre les récifs rocheux de l’écosystème B d’où l’espèce était initialement absente. C’est ce qu’on appelle l’effet relais. Ainsi les larves des organismes situés sur l’écosystème A qui ne peuvent pas directement coloniser l’écosystème B, le pourraient possiblement en présence d’éoliennes.

Les parcs éoliens français sont situés près des côtes françaises, ils ont donc peu de risques de créer un effet relais entre les côtes anglaises et françaises par exemple. L’effet relais à l’échelle des façades maritimes françaises aurait peu d’impact car beaucoup d’autres structures et activités déplacent des espèces ou jouent déjà le rôle de relais à cette échelle (trafic maritime, aquaculture, bouées …). Le risque de propagation d’espèces non indigènes via l’effet relais des parcs éolien français semblerait limité.

En bref, le risque de propagation d’espèces non indigènes, via la mise en place de parcs EMR en France semble limité mais non négligeable. Les experts recommandent de développer un protocole de suivi sur les fondations des parcs éoliens afin d’observer et de signaler le développement d’espèces indigènes.

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